**WEDNESDAY**

Une chanson de Wednesday est une mosaïque. Un recueil de nouvelles, un demi-mémoire, un patchwork de portraits du sud de l’Amérique, des moments épars qui, d'une manière ou d'une autre, font sens dans leur ensemble. Karly Hartzman, la compositrice, chanteuse et guitariste à la tête du projet, est une collectionneuse d'histoires autant qu'une conteuse : une érudite des gens et des répliques. Rat Saw God, le nouveau et meilleur disque du quintette d'Asheville, est ekphrastique mais autobiographique et, surtout, profondément empathique. Sur les dix titres de l'album, Hartzman, le guitariste MJ Lenderman, la bassiste Margo Shultz, le batteur Alan Miller et le joueur de lap steel Xandy Chelmis construisent un sanctuaire de la minutie. Des textes mi-drôles, mi-tragiques de la Caroline du Nord qui se déploient quelque part entre le skuzz gémissant du shoegaze des années 90 et le twang classique de la country, ce lap steel déformé et la voix de Hartzman tranchant dans le flot.

Rat Saw God est un album sur le fait de rouler à vélo dans une banlieue de Greensboro en écoutant My Bloody Valentine pour la première fois sur un iPod Nano, le long d'un ruisseau qui traverse le quartier, criblé de bouteilles de verre cassées et de préservatifs, un jardin rempli de pièces de voitures cassées et rouillées, une maison solitaire et délabrée envahie par le kudzu. Un enfant qui brûle un champ de maïs, des monuments au bord de la route, des chapiteaux d'église, du poppers et de la vodka dans une bouteille d'eau en plastique, les conneries que l'on peut faire dans un camp d'été, d'étranges souvenirs de famille dans les magasins de seconde main. La façon dont le Sud vibre toute la nuit en été et en automne, le son des matchs de football des lycées, l'effet de halo des lumières qui polluent l'obscurité. Il n'y a pas assez de lumière pour voir devant soi, mais dans cette étendue de vide noir, d'une certaine manière, on voit tout.

Rat Saw God a été écrit dans les mois qui ont suivi l'achèvement de Twin Plagues, et enregistré en une semaine au studio Drop of Sun d'Asheville. Si Twin Plagues a été une percée critique pour Wednesday, il a également été une percée créative et personnelle pour Hartzman. L'album, qui a été encensé, décrit les sentiments de dérangement, les traumatismes et la consommation d'acide. Hartzman a pensé à ses auditeurs, à sa mère qui entendait ces chansons, à ce que l'on ressent lorsqu'on vide son sac. Et à la fin, tout s'est bien passé. "J'ai vraiment franchi cet obstacle avec Twin Plagues, où je ne m'inquiétais pas du tout d'être vulnérable - j'étais enfin à l'aise avec ça, et je veux vraiment rester dans cette zone."

Le morceau d'ouverture de l'album, "Hot Rotten Grass Smell", arrive brusquement : un mur de sons dissonants, explosif et gémissant, qui s'accorderait parfaitement avec n'importe quel album shoegaze des années 90, avant de s'éteindre dans un chœur gazouillant de perruches, un son nocturne. Et puis il y a le single de huit minutes et demie, "Bull Believer", qui est déjà sorti. D'autres morceaux, comme le sinistre "What's So Funny" ou "Turkey Vultures", interrogent l'intériorité de Hartzman - des portraits intimes de l'adaptation, de l'impuissance. "Chosen to Deserve" est une véritable chanson d'amour, agrémentée de riffs de guitare déchirants, aux allures de country classique. "Bath County" raconte un voyage que Hartzman et son partenaire ont fait à Dollywood, et le temps passé dans le vrai comté de Bath, en Virginie, où elle a écrit la chanson lors d'une visite, assise sur un porche. Et "TV in the Gas Pump", la chanson la plus proche de Rat Saw God, est une véritable chanson de voyage, écrite à partir d'une longue note d'iPhone que Hartzman a conservée pendant qu'elle était dans la camionnette.

Le morceau phare "Quarry", riche en références, est peut-être l'exemple le plus évident de la manière dont Hartzman tisse de manière fluide toutes ces lignes de force. Elle s'inspire de l'imagerie de Cruddy de Lynda Barry, d'une collection d'histoires de la famille de Hartzman (son père a brûlé ce champ de maïs), de ses voisins actuels et de la rue de Virginie occidentale où vivait sa grand-mère, juste à côté d'une carrière de roche, où les explosions secouaient occasionnellement le quartier et où tout le monde continuait à vivre normalement.

Les chansons de Rat Saw God ne racontent pas des épopées, juste le quotidien. Elles sont vraies, elles sont la vraie vie, floue, chaotique et étrange - ce qui est en accord avec l'éthique de Hartzman elle-même : "L'histoire de chacun est digne d'intérêt", dit-elle, sans détour. "Littéralement, chaque histoire de vie vaut la peine d'être écrite, parce que les gens sont si fascinants."

Mais le truc avec Rat Saw God - et avec n'importe quelle chanson de Wednesday, en fait - c'est que vous n'avez pas nécessairement besoin de toutes les références pour comprendre. Tout est dans les détails - à quel point tu as été ou es dans la merde, comment tu brises un cœur, comment tu tombes amoureux, comment tu te fais voir et voir les autres - mais c'est surtout la façon dont ces petits moments s'additionnent pour former une chanson, un album ou une personne.

-

Présenté par POINT EPHEMERE.

No Covid-19 entry requirements

Top track

Wednesday

Top track

About

Lineup

Venue

Point Ephémère

Download the DICE app